Cérémonie d’ouverture de la 28ème édition des JCC

    L’avenue Habib Bourguiba, artère principale du centre ville de Tunis, s’est paré samedi soir de toute sa beauté au rythme de la cérémonie d’ouverture de la 28ème édition des Journées Cinématographiques de Carthage (JCC) dont le coup d’envoi officiel a été donné par le ministre des affaires culturelles Mohamed Zine el Abidine, en présence d’un grand nombre de ministres, d’ambassadeurs, d’artistes et í’invités de tous bords des JCC dans leur édition 2017.

    60 projections par jour, 180 films du monde entier, 19 premières mondiales, 23 premières arabes, 27 premières africaines et 15 films écrits et réalisés par des femmes tel est en somme l’originalité de “cette édition qui se veut exceptionnelle à plus d’un titre”, a mentionné le directeur des JCC Nejib Ayed.

    “Nous avons essayé de concilier les principes fondamentaux du festival à l’esprit et aux exigences de l’époque” a-t-il relevé dès lors que les JCC sont un festival arabo-africain par excellence. Toutes les compétitions y sont dédiées aux films arabes et africains, en essayant de revenir progressivement à l’équilibre entre la présence africaine et arabe, avec une insistance sur l’Afrique, étant qu’elle représente la pierre angulaire du festival.

    Les JCC, a-t-il ajouté, sont aussi un festival du sud et plus particulièrement, un festival des trois continents à savoir l’Afrique, l’Asie et l’Amérique Latine, sans oublier bien sûr sa dimension méditerranéenne. Et d’ajouter “C’est un festival qui respire d’un souffle militant en parfaite harmonie avec ses principes fondamentaux et qui s’abreuve de nos causes à l’aube du troisième millénaire”.

    L’organisation d’une session annuelle des JCC qui a été perçue par certains comme une aventure vu que le nombre des films produits en Afrique et dans le monde arabe, ne saurait suffire, vient de prouver le contraire, a-t-il rétorqué puisque la production en Afrique et dans les pays arabes, s’est avérée non seulement fertile mais aussi éloquente.

    En Effet, le nombre de films présentés cette année a mis le comité d’organisation face au dilemme du choix et de la sélection, étant donné l’abondance des œuvres de qualité. Par exemple, la production tunisienne cette année, a atteint un seuil record : 37 long-métrages et 41 courts métrages.

    Cette année, les JCC mettront à l’honneur les pays des trois continents étant donné le foisonnement des œuvres et la dynamique culturelle que connaissent ces pays: l’Algérie en tant que représentant des pays arabes, l’Afrique du Sud pour l’Afrique sub-saharienne, la Corée du sud comme représentant de l’Asie et l’Argentine pour l’Amérique Latine

    Par ailleurs, a-t-il ajouté, les JCC veilleront à l’organisation désormais de quatre festivals permanents de cinéma dans quatre régions intérieures et ce dans une approche de décentralisation du festival et en vue d’un plus grand rayonnement dans les régions, à savoir Menzel Bourguiba, Kairouan, Monastir et Djerba et ce, en partenariat avec la société civile et les autorités locales et régionales. L’expérience pilote de projection de films dans les prisons et les établissements de rééducation, se poursuivra aussi cette année en présence des invités.

    Dans cette vision de faire vivre la ville de Tunis et son avenue symbole, l’avenue Habib Bourguiba, au rythme des JCC, le seul festival qui appose à la ville un cachet de fête, il est important de mentionner, a précisé le ministre des affaires culturelles que la Tunisie connait depuis une période récente un vrai décollage grâce à une élite cinématographique de différentes générations et de différents âges qui misent sur le développement du secteur du cinéma en favorisant une évolution de la production et une plus grande créativité et innovation.

    Cette année, la production cinématographique a atteint 78 œuvres soutenues dans sa grande majorité par le ministère des Affaires culturelles. Pour accompagner cette mutation galopante, le CNCI (Centre national du cinéma et de l’image), a-t-il mentionné connaît une réforme structurelle et une révision des statuts, se traduisant notamment par la création d’une cinémathèque nationale dont le siège sera à la Cité de la Culture.

    Les JCC ont aussi une occasion pour dire un grand merci au rêve des rêveurs et à l’imaginaire des créateurs qui diffusent les valeurs du beau et de l’humain, les valeurs de la vie, de l’espoir et de la conviction en un lendemain meilleur et en des horizons plus larges, des valeurs qui luttent contre la radicalisation et le chauvinisme, des valeurs qui favorisent le vivre ensemble, l’amitié et l’estime, des valeurs qui soufflent l’esprit de la diversité culturelle avec sa dimension polyphonique et représentation, des valeurs artistiques, esthétiques et humaines, qui bannissent l’exclusion, la division, l’intimidation et le terrorisme.

    Avec un tapis rouge déroulé, et sous haute surveillance, sécuritaire et dans une organisation à saluer par rapport à l’édition 2012, le Colisée, “La Reine des salles” a accueilli hier soir ses invités de tout bord pour assister à la soirée d’ouverture où des hommages par la musique, l’habillage numérique et la danse tango ont été rendus aux pays invités d’honneur, l’Algérie, l’Afrique du Sud, la Corée du Sud et l’Argentine.

    L’édition 2017 ne manquera pas également de rendre des hommages posthumes à des hommes et femmes de cinéma qui ont laissé leurs traces dans les annales du cinéma comme la cinéaste tunisienne Kalthoum Bornaz, Abdelaziz Frikha, un des pionniers modernes de l’image en Tunisie, le critique et historien du cinéma égyptien Samir Farid mais aussi aux frères Goubantini à qui revient le mérite de créer la première salle le Colisée à Hammam Lif (Banlieue sud de la capitale).

    Sous le halo des projecteurs des médias tunisiens mais aussi internationaux, et en présence d’un grand nombre d’artistes tunisiens pour ne citer que Dorra Zarrouk de Tunisie, et d’acteurs arabes dont le comédien égyptien Amr Waked, la palestinienne Areen Omari, le syrien Ghassen Massoud, le réalisateur palestinien Rashid Masharwi dont le film ” Ecrire sur la neige” a fait l’ouverture, dans une première mondiale, des JCC 2017, a tenu à répéter “le cinéma doit créer l’espoir même s’il n’existe pas”.

    Réalisé en huis-clos, “Ecrire sur la neige”, une fiction de 72mn, se déroule pendant une nuit où cinq palestiniens sont piégés dans un petit appartement pendant la guerre sur la Bande de Gaza. Une secouriste et deux hommes dont l’un est blessé se réfugie chez un couple pendant le bombardement. L’espace confiné du petit appartement et l’intensité des attaques israéliennes font paraître les divisions politiques et sociales entre eux.

    A travers ces cinq personnages, le réalisateur Rashid Masharawi pointe l’intolérance religieuse et la négation de l’autre, principaux facteurs de l’affaiblissement de leur résistance et de leur solidarité contre l’occupation israélienne. Dans cet huis-clos, reflet de la société palestinienne contemporaine, Masharawi dessine d’une manière philosophique et métaphorique le drame interne du peuple palestinien. Entre une parole fortement chargée et l’obstination de la fuite du temps, le film se lit comme une allégorie soulignant l’absurdité du conflit interne du peuple palestinien face à ce qui peut les unir : une histoire humaine commune.

    Présent lors de cette projection, Rashid Masharawi a tenu à exprimer son émotion de présenter son film en première mondiale à l’occasion de l’ouverture des JCC, précisant que le tournage du film s’est déroulé en Tunisie avec la participation de techniciens tunisiens et d’une pléiade d’acteurs arabes de différentes nationalités.

    Car “Ecrire sur la neige” pour son réalisateur ne représente pas seulement la Palestine mais tous les pays arabes dont chacun est disloqué pour des raisons ethniques, idéologiques, historiques ou tribales.

    D’après TAP