Trois chiffres de l’actualité économique « inquiètent beaucoup » l’économiste Ezzeddine Saidane

L’économiste Ezzeddine Saïdane, qui suit de près l’actualité économique a analysé, dans un post sur sa page Facebook, « trois chiffres qui inquiètent …beaucoup », selon ses propres mots. 
Il s’agit, en premier lieu, du chiffre relatif au niveau atteint par les réserves de change, soit 84 jours d’importations. « Le niveau des réserves de change de la Tunisie atteint un niveau très bas, l’équivalent de 84 jours d’importations seulement. Pourquoi cela est-il inquiétant ? Dans tous les pays on considère que le niveau de 90 jours d’importations est une ligne rouge de laquelle il ne faut pas s’approcher. En effet l’équivalent de 90 jours d’importations est considéré à peine suffisant pour couvrir les importations essentielles et prioritaires qui concernent les produits alimentaires, les médicaments et les hydrocarbures. Ainsi un pays dont les réserves de changes atteignent ou passent en dessous de l’équivalent de 90 jours d’importations est un pays qui n’est pas en mesure de rembourser ses dettes extérieures », a-t-il développé. 
Et de poursuivre « Il faut lier ce niveau de réserves de change à deux autres faits importants. Le premier c’est que le FMI n’a pas encore débloqué la troisième tranche du crédit de 2,9 milliards de Dollars et vient de reporter la réunion de son comité exécutif, qui prendrait la décision de déblocage éventuel, au mois de mars. Le deuxième fait est relatif à la décision de la Tunisie de solliciter le marché financier international au cours de la deuxième moitié du mois de mars pour un nouveau crédit (sous forme d’emprunt obligataire) d’un montant d’un milliard de Dollars (2,5 milliards de Dinars). Nos indicateurs économiques et financiers, la notation souveraine de la Tunisie et notre niveau de réserves de change font que cette sortie sur le marché pourrait s’avérer périlleuse. 
En effet, le risque serait de ne pas pouvoir lever tout le montant sollicité et/ou de le lever à des conditions de taux d’intérêt prohibitives », a-t-il encore soutenu. 
Le deuxième chiffre qui inquiète l’économiste concerne le montant de liquidités (création monétaire) injecté par la Banque Centrale (BCT) pour maintenir le système bancaire à flot, soit 12 652 millions de Dinars (12 652 milliards de millimes). « C’est la planche à billets. Une planche à billets qui se déchaine littéralement. Il s’agit d’un record absolu. Ce niveau de liquidités permet de refinancer les emprunts de l’Etat auprès des banques tunisiennes pour les besoins du budget. Il s’agit là d’une des principales sources d’inflation ! », estime-t-il. 
Le troisième chiffre, pas moins inquiétant, c’est celui relatif à la masse de billets de banque et de pièces de monnaie émis par la BCT et mis en circulation dans l’économie, ayant atteint 11 915 millions de Dinars (11 915 milliards de millimes). Ce niveau, qui correspond à peu près au double du volume habituel (avant 2011), montre, selon lui, l’ampleur de l’économie parallèle, de l’économie hors la loi. 
Et de conclure « Ces trois chiffres montrent combien il est urgent, très urgent d’arrêter l’hémorragie et d’engager notre pays sur la voie du sauvetage de son économie et de ses équilibres financiers. Un plan d’ajustement structurel doit être élaboré et implémenté dans les meilleurs délais ».