Tunisie face à la chute du pétrole : opportunité budgétaire ou alerte économique ?

Baisse du prix du pétrole en 2025 : une aubaine ou un piège pour l’économie tunisienne ?

Date de rédaction : 13 avril 2025
Réalisé par : Karim Fathallah


Introduction

La récente chute du cours du pétrole brut Brent en 2025 suscite des réactions contrastées parmi les économistes tunisiens. Alors que certains y voient une opportunité budgétaire inespérée pour l’État tunisien, d’autres mettent en garde contre des effets secondaires à moyen et long terme. À travers deux analyses publiées récemment, il apparaît que cette baisse des prix, bien que favorable en apparence, pourrait cacher des risques structurels pour l’économie nationale. Voici un résumé des deux points de vue, suivi d’une mise en perspective comparative.


Analyse 1 – Un effet positif sur le budget de l’État

La première lecture, portée par l’économiste Ridha Chkoundali, insiste sur les bénéfices directs de la baisse du prix du pétrole pour le budget tunisien. Le baril de Brent ayant été estimé à 77,4 dollars dans la loi de finances 2025, sa stabilisation autour de 70 dollars permettrait à l’État de dégager un excédent budgétaire évalué à près de 980 millions de dinars. Cet allègement inattendu des dépenses énergétiques pourrait représenter un véritable « financement gratuit » pour le pays, dans un contexte de difficultés d’accès aux marchés internationaux de financement.

Cet excédent permettrait également de renforcer les réserves en devises, stabiliser le dinar et soutenir la politique monétaire en réduisant les pressions inflationnistes. La Banque centrale tunisienne pourrait ainsi envisager une baisse des taux d’intérêt, facilitant les investissements privés et relançant la croissance.


Analyse 2 – Des risques à moyen et long terme

À l’inverse, l’économiste Bassem Ennaifer adopte une position plus prudente. Bien qu’il reconnaisse une économie budgétaire de près de 162 millions de dinars à court terme, il alerte sur les conséquences possibles d’une récession mondiale induite par cette baisse prolongée des prix du pétrole. La Tunisie, fortement dépendante de ses exportations vers l’Europe, pourrait souffrir indirectement de la baisse de la demande dans les industries exportatrices, notamment mécaniques, électriques et agroalimentaires.

De plus, la baisse des recettes liées à l’huile d’olive, principal produit d’exportation agricole, pèserait sur la balance commerciale alimentaire, affaiblissant ainsi l’équilibre global de la balance commerciale. Ennaifer estime que ces effets, bien que moins visibles à court terme, pourraient réduire les gains escomptés du côté budgétaire et mettre en péril la stabilité macroéconomique à moyen terme.


Comparaison des deux approches

Aspect analyséVision optimiste (Article 1)Vision prudente (Article 2)
Impact budgétaire immédiatExcédent estimé à 980 millions de dinarsÉconomie budgétaire d’environ 162 millions de dinars
Effets sur la monnaieRenforcement des réserves, stabilité du dinarRisques liés aux exportations en baisse
Inflation et taux d’intérêtRéduction de l’inflation, baisse des taux prévueIncertitude sur la croissance mondiale, instabilité potentielle
Relations économiques extérieuresApport favorable en termes de financement interneBaisse de la demande européenne, affaiblissement des exportations
Équilibre commercialAmélioration attendue à court termeDétérioration possible à cause du recul de certains secteurs clés

Conclusion

La baisse du prix du pétrole, souvent perçue comme un soulagement budgétaire pour les pays importateurs comme la Tunisie, s’avère plus complexe à évaluer. Si à court terme les gains budgétaires peuvent être considérables, les dynamiques économiques mondiales pourraient en réduire significativement les bénéfices. Une lecture équilibrée de la situation doit tenir compte de ces deux niveaux d’analyse : les bénéfices immédiats d’un côté, et les répercussions économiques potentielles à moyen et long terme de l’autre. La prudence reste donc de mise dans les projections politiques et budgétaires.


Sources :

  • Article 1 : Tunisie-Actu – Ce que la baisse des prix du pétrole signifie pour le budget de l’État tunisien en 2025
  • Article 2 : La Presse de Tunisie – Pourquoi la baisse du pétrole pourrait nuire à l’économie tunisienne