Afrique : Le Partenariat Public-Privé, une solution aux défis de logements sociaux et des villes urbaines ?

    De 27 millions en 1950, la population citadine africaine a atteint 30 millions en 1960, 415 millions dans les années 2000 et les prévisions affirment que les villes abriteront 950 millions d’habitants en 2050. Il est aussi prévu que d’autres villes verront le nombre de leurs résidents dépassés les 10 millions d’habitants d’ici peu, car « la population urbaine croit au rythme vertigineux d’environ 7 % par an ».

    Dans l’ensemble, l’Afrique accueillera un ¼ de l’humanité en 2025. Cette croissance démographique comporte plusieurs défis et ne manquera pas d’exercer une pression sur les infrastructures, dont les logements. Face à ce défi, plusieurs banques privées et aussi des sociétés de bâtiments ont anticipé et proposent déjà des logements aux classes moyennes à la limite de leurs portefeuilles.

    Les opportunités de la croissance démographique :

    Si beaucoup pensent que la forte croissance démographique de l’Afrique est un handicap à son développement, elle constitue un grand défi en termes d’infrastructures, notamment les logements. Contrairement aux pessimistes, des experts comme Tidjame Thiam affirment que « la démographie n’est pas une fatalité » mais plutôt une opportunité, a-t-il déclaré à wwwagenceecofin.com. Car, dans le domaine des infrastructures urbaines indispensables pour les années 2050, aucun investissement n’a encore réalisé, cela constitue donc de grandes opportunités économiques pour les investisseurs.

    A cet effet, la Banque Mondiale a souligné que les programmes des gouvernements pour satisfaire les demandes croissantes de leur population urbaine en termes d’habitation sont « insuffisants, couteux, inaccessibles aux citadins pauvres ». Alors, pour satisfaire la demande, et répondre aux problèmes des infrastructures, surtout celui du logement, plusieurs experts recommandent le Partenariat Public-Privé (PPP). Cette recommandation a été soutenue par Mamta Murthi, Vice-présidente de la Banque mondiale pour le Développement humain qui estime que « les autorités devront s’associer au secteur privé pour favoriser les investissements dans le logement en élargissant l’accès au parc existant et en améliorant la qualité de ce dernier, et permettre dans le même temps à la population d’obtenir plus facilement des prêts fonciers et immobiliers ».

    Pareillement, d’autres organismes soutiennent que le Partenariat Public-Privé est une solution aux problèmes de l’habitat. A propos, ONU-Habitat a déclaré que « les Partenariats Public-Privé libèrent des financements pour d’autres projets d’infrastructure urbaine de deux façons : tout d’abord par les réductions potentielles des coûts inhérentes à l’approche PPP et, ensuite, grâce à l’accès à des financements privés qui permet à l’État d’étaler les paiements pour les services rendus sur une plus longue période ».

    Exemple d’alliance entre le public et le privé pour les villes nouvelles ?

    Chaque année, les besoins en infrastructures de logement augmentent. A titre illustratif, en Afrique subsaharienne, les besoins sont évalués entre 12,5 à 35 milliards de dollars chaque année. Mais les charges des pouvoirs publics ne leur permettent pas de satisfaire leurs populations en termes d’infrastructures, puisqu’il y a d’autres priorités. Recours est alors fait à des investisseurs immobiliers, des banques privées, …dans une forme de partenariat pour restreindre les coûts et les charges.

    Devant les défis de la croissance urbaine, deux formules sont proposées : Les nouvelles villes et les logements sociaux. Selon les spécialistes du domaine, les villes nouvelles ont pour fonction le désengorgement des métropoles et ne priorisent pas assez les logements sociaux.

    Un exemple de projet urbanistique réalisé avec un PPP est celui de l’Egypte et de l’Angola ainsi que Lagos qui se sont lancés dans un vaste programme de construction de nouvelles villes. Les autorités du Caire ont donc décidé de bâtir « 20 villes nouvelles de 4e génération ». Rien que pour la future capitale administrative construite sur 730 km2, cela nécessite un investissement de 40 milliards d’euros pour 6 millions d’habitants. Les villes qui seront construite, abriteront 30 millions d’habitants.

    Quant à l’Angola, il s’agit de la ville de Cidade do Kilamba qui abrite 500.000 habitants. Il s’agit d’un projet de CITIC Group et de la banque ICBC de Chine populaire. Cela a nécessité un investissement de deux milliards et demi de dollars pour la construction de 409 édifices de 20000 appartements pour loger 120000 personnes. Elle compte 24 jardins d’enfants, des écoles maternelles, neuf écoles primaires et huit écoles secondaires, une sous-station de distribution de l’énergie électrique et une usine de traitement d’eau potable.

    Le Partenariat Public-Privé solution pour satisfaire les besoins en logements sociaux :

    S’agissant des logements sociaux, plusieurs types de partenariats existent et diffèrent d’un pays à un autre et aussi des investisseurs.

    En Côte d’Ivoire, se sont « 46 promoteurs, dont 42 ivoiriens et quatre étrangers qui se partagent le marché de construction de logements. Plusieurs projets de logement sociaux ont été initiés : « La Société Ivoirienne de Construction et de Gestion Immobilière, détenue à 80% par l’État, s’est associée à des partenaires béninois, chinois, sud-africains et néerlandais en vue de la construction de 20000 unités à Abidjan, un chantier estimé à 335 milliards de francs CFA (510,7 millions d’euros). Deux groupes de BTP marocains – Addoha et Alliances – se sont investis dans la construction de 19 000 logements économiques à Abidjan et dans sa banlieue ». Comme ces appartements, maisons sont chères et coutent entre 7 à 10 millions de F CFA (entre 10.700 et 15.200 euros), difficiles donc pour la population moyenne de les acquérir. Face à leur faible pourvoir d’achat, des partenariats sont signés entre les entreprises et les banques pour assouplir les conditions d’obtention de crédits bancaires par les acquéreurs.

    Concernant le Sénégal, ce sont 100 milliards de FCFA qui ont été injectés par l’État et les promoteurs/développeurs privés et publics pour la construction progressive « pôles urbains » et de 28.698 logements entre 2014 et 2018. La Guinée aussi a initié des programmes par la signature de partenariat avec des entreprises locales et étrangères pour la construction de 120000 logements sociaux à Lambanyi et Kobaya. Dans le même pays, il a été initié la mise à la disposition des habitants de 50.000 logements à Kassonyah pour un investissement de plus d’un milliard de dollars de la Banque de l’habitat tunisienne.

    Pareillement, le Maroc a initié un vaste programme depuis 2010. Son modèle consiste à offrir un avantage « équivalent au montant de la TVA reversé par l’État aux promoteurs avec lesquels il signe une convention, ainsi qu’un accès privilégié au foncier.

    Enfin, un modèle a été proposé par la Société Financière Internationale (SFI), filiale du groupe de la Banque Mondiale en charge du développement du secteur privé et CITIC Construction Co Limited, une entreprise chinoise spécialisée dans les travaux de construction et l’ingénierie ont initié un fonds de 300 millions de dollars pour soutenir « le développement des logements sociaux en Afrique subsaharienne ».

    A la lecture de ces modèles de Partenariat Public-Privé pour répondre aux défis de logements des populations africaines et surtout la construction de nouvelles cités africaines face à la forte croissance ainsi que la résilience climatique, on note que le secteur du logement social est une aubaine pour les investisseurs immobiliers et aussi de l’ensemble du secteur BTP.

    E. Fleury