Le taux d’endettement de la Tunisie ne pourrait atteindre 62% sans une sortie sur le marché financier international
La hausse du taux d’endettement de la Tunisie lequel est passé de53% à 62% du PIB, annoncée par Youssef Chahed, nouveau chef du gouvernement, n’est qu’un « calcul technique », a affirmé l’universitaire Fethi Ennouri, dans un entretien accordé à l’agence TAP. Cette hausse ne pourrait avoir lieu, estime-t-il, sans sortie, en 2016, sur le marché financier international.
Le chef du gouvernement désigné Youssef Chahed avait annoncé, mercredi 26 aout 2016, lors de la plénière de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) consacrée au vote de confiance, qu’en 2016, le taux d’endettement augmentera pour passer de 53% (prévu) à 62%.
Dans un entretien accordé à l’agence TAP, Ennouri a expliqué qu’une hausse de 8 points nécessite la sortie sur le marché financier international pour mobiliser des financements. « La Tunisie n’a même pas obtenu les financements déjà mobilisés, lesquels sont estimés à 6,5 milliards de dinars », a insisté l’économiste.
Le taux d’endettement « reste critique mais non catastrophique », a estimé Ennouri, précisant que la Tunisie, qui fait face à des difficultés majeures, n’est pas, toutefois, en situation de faillite.
En cas d’adoption des politiques préconisées par le gouvernement Chahed en matière de rationalisation des salaires, la Tunisie pourrait connaitre une crise économique et sociale, a encore prévenu l’économiste.
Le gouvernement prévoit une augmentation de la masse salariale de 2600 milliards de dinars en 2017, en se basant sur un taux de croissance « non garanti » de 3% et des prévisions tablant sur une baisse du taux de croissance pour 2016 à 1,5% au lieu de 2,5% prévu, selon Ennouri.
Le gouvernement de Chahed sera contraint, d’après l’économiste, d’adopter une politique d’austérité face aux difficultés de mobilisation des ressources et l’impossibilité d’avoir des crédits extérieurs d’une valeur de 9 milliards de dinars en 2017.
Le nouveau gouvernement pourrait opter aussi pour l’augmentation des impôts et faire face à des réticences de la part du secteur privé ou aussi au gel des augmentations salariales ou leur baisse et la baisse des dépenses de développement.
Ennouri a aussi évoqué la possibilité de profiter de » l’expérience du consensus » en Tunisie pour parvenir à une solution et à des accords entre le gouvernement et les parties syndicale et patronale concernant les salaires.
Il a appelé le gouvernement à » reconstruire sa relation avec le patronat et le syndicat « , une relation qu’il qualifie de » déséquilibrée » à l’heure actuelle.
Le gouvernement Chahed est aussi appelé à adopter une nouvelle politique de communication efficace et » dire la vérité au peuple » et aussi prendre une série de mesures pour lutter contre la corruption, estime Ennouri.
Il a fait remarquer que si le gouvernement tiendra sa promesse concernant l’arrestation des « barons de la contrebande » et la révélation des noms des impliqués au bout de 6 mois, ceci pourrait apporter la preuve de son sérieux et de son efficacité quant au traitement de ce dossier.
Sur un autre plan, l’économiste s’est montré inquiet quant aux éventuelles mesures réformistes, notamment, le licenciement des employés. Ceci ne pourrait être qu’un ultime recours, soit en cas de faillite alors que la » Tunisie est bien loin de cette état « , estime encore Fethi Ennouri.
Evoquant la maitrise de la balance des paiements, il a indiqué que le gouvernement Chahed doit baisser les importations, surtout que 65% des importations de produits de consommation sont dispensables. Ceci pourrait épargner au pays une baisse des réserves en devises, selon ses dires.
Il faut aussi, d’après lui, évaluer la stratégie du ministère du Commerce dans ce domaine et œuvrer à promouvoir les exportations, encourager les exportateurs et améliorer la diplomatie économique de la Tunisie.