La fonderie est l’un des procédés de formage des métaux qui consiste à couler un métal ou un alliage liquide dans un moule pour reproduire, après refroidissement, une pièce donnée (forme intérieure et extérieure).
L’industrie de la fonderie, utilisatrice de matières premières (fonte, ferraille, coke), fournit des pièces finies ou semi-finies à l’ensemble de l’industrie (l’automobile, la sidérurgie, le matériel de manutention, l’équipement industriel, l’aéronautique, l’armée,…, etc.). Elle est à ce titre une industrie de base.
A cet effet, voici une analyse de la situation actuelle de la branche en Tunisie.
En 2016, la valeur de la production était de l’ordre de 117 MTND contre 30.1MTND en 2002, enregistrant un TCAM de 10%.
La production des métaux non ferreux accapare la part de lion avec 66% de la production totale de la branche « fonderie ».
Cet accroissement s’explique par la création de nouvelles fonderies de métaux non ferreux à l’instar de MAGAL DIE CASTING et MONTCELLI, les restructurations financières et industrielles touchant la société TUNICAST ainsi que l’adoption de nouvelle politique marketing par les sociétés SAFAS et FMT.
La part de production de l’activité « Fonderie » est restée stagnante depuis 2002 et représente 8% de la production du secteur «Sidérurgie, Métallurgie et Fonderie». Cette dernière a enregistré un ralentissement de la production et de la valeur ajoutée sur la période (2010- 2014) avec un TCAM de 4%.
La branche « Fonderie » compte actuellement 29 unités industrielles employant plus de 1500 personnes. Ces fonderies sont classées selon trois catégories de produit : Fonderie d’acier, Fonderie de fonte, Fonderie de métaux non ferreux (Aluminium, Cuivre, Zamak,.., etc.).
Il est à signaler que 66% des entreprises sont des fonderies de métaux non ferreux, elles emploient 894 personnes.
11 fonderies de métaux non ferreux sont totalement exportatrices, spécialisées dans la fabrication des produits en aluminium, en zamak et en alliages cuivreux, ce qui explique l’évolution notable de cette activité pendant les dernières années.
66% des fonderies en Tunisie sont implantées dans les gouvernorats de Ben Arous, Sfax, et Zaghouan. Par contre, la part des régions intérieurs est négligeable, voire insignifiante.
7 entreprises opérant dans ce secteur sont certifiées, soit 24 % des entreprises. La certification ISO 9001 est la plus répondue pour toutes les entreprises du secteur.
Concernant les investissements, 47 attestations de dépôts de déclarations ADD de projets de fonderie ont été déposés sur la période 2010-2015 pour un investissement total de 55 MTND et permettant la création de 1250 postes d’emploi.
75% des ADD sont des projets de création, 19% des projets d’extension et 6% des projets de reconversion.
Les gouvernorats de Zaghouan et de Ben Arous détiennent la part importante avec 41% des investissements déclarés.
On note l’entrée en production d’une nouvelle fonderie de fonte dans la région de Zaghouan disposant de technologies avancées de moulage et fusion.
La gamme des produits fabriqués par les fonderies tunisiennes sont de deux types : ferreux et non-ferreux.
Concernant le premier type, il s’agit principalement d’articles de canalisations d’eau, de regards de chaussée, volute de pompe, flasques, pièces mécaniques diverses, …, etc.
En ce qui concerne l’acier, les produits fabriqués sont principalement des parties de turbines et des pompes pour le secteur du gaz & pétrole, des pièces mécaniques, pièces de rechange pour cimenterie (boulés pour tonneaux), des plaques de blindage de concasseur pour briqueterie,…, etc.
Pour les métaux non-ferreux nous citons : L’aluminium, le Zamak, le laiton.
La gamme des produits fabriqués concerne principalement des articles de quincaillerie (poignées de portes, crémones, boutons de portes, loquets, targettes, etc.), des articles sanitaires (accessoires de salles de bains, etc.), des pièces de décoration, des accessoires de réseaux électriques moyenne et basse tension (pinces d’ancrage, éléments d’accrochage pour isolateurs, etc.) et des éléments de radiateurs de chauffage.
Qui sont les clients potentiels des produits de la branche «Fonderie » ?
On cite : les fabricants de matériel roulant, utilisateurs de matériel agricole (pièces de charrue), SONEDE, STEG, ONAS et sous-traitants de travaux d’assainissement, entreprises d’hydraulique industrielle, industrie mécanique, industrie pétrolière, pièces de rechange pour cimenterie, entreprises de mécanique, entreprises d’hydraulique, entreprises de bâtiments, sociétés de transport…
Les Echanges extérieurs
Le niveau des échanges en 2015 a été de 87 MTND pour les exportations et de 215 MTND pour les importations. Il en a résulté un déficit commercial de 128 MTND, correspondant à un taux de couverture de 40%, alors que ce taux était de 36% en 2012.
A cet effet, les exportations tunisiennes en produits de fonderie ont augmenté de 18% par rapport l’année précédente.
Par ailleurs, notons que les produits en métaux ferreux (acier et fonte) représentent plus que 80% des importations. La majorité des produits importés sont fabriqués et/ou peuvent être fabriqués par les fonderies tunisiennes tels que les accessoires de tuyauterie en fonte ou en acier.
Les pays de l’union européenne sont les premiers exportateurs vers la Tunisie en la matière. La France et l’Italie détiennent la part du lion avec 38%, ensuite vient la Chine avec 11%.
D’autre part, la valeur des exportations des pièces moulées en fonte est supérieure à 23 MTND, alors que la branche inclut une seule fonderie totalement exportatrice et la production nationale en la matière ne dépasse pas dans le meilleur des cas les 25 millions de dinars.
Les principaux clients de la Tunisie en produits de fonderie, en 2015, sont l’Italie avec 31% de la valeur des exportations, soit 27 MTND, suivie de la France avec 28%, puis le Royaume Unie avec 6%. Les pays du Maghreb, l’Algérie et la Libye viennent en 4ème et 5ème positions avec 3% et 2% respectivement.
En ce qui concerne les échanges commerciaux de déchets et débris métalliques, on constate que les exportations de ferrailles d’acier et fonte ont passé de 16 Millions de dinars en 2011 à 9 Millions de dinars en 2015, soit une baissé de 44%.
En revanche, les exportations des déchets et débris non ferreux ont enregistré une forte croissance sur la même période, et notamment après la révolution.
Signalons que les exportations de déchets et débris de cuivre et alliages se sont multipliés par trois entre 2010 et 2012.
Organisation de la branche
Plusieurs fonderies sont des entreprises familiales, dont le père est généralement le fondateur qui associe ses fils à la gestion de l’entreprise pour les préparer à la relève. Il est à signaler que les fonctions commerciales et marketing sont réduites au sein de la plupart des entreprises sauf pour les fonderies totalement exportatrices. Ceci a conduit quelques entreprises à travailler en intermittence ou à arrêter complètement leur activité. Nous citons le cas de la fonderie SINCAP qui a été fermée en 2006.
La Formation professionnelle et Ressources humaines
La formation du métier de fonderie n’existe pas dans les programmes de l’enseignement.
Généralement, l’apprentissage du métier de fonderie obéit aux règles de compagnonnât. Un seul centre de formation professionnel des arts du feu créé en 2001 à Nabeul, qui permet de former des opérateurs qualifiés (CAP) ou des chefs d’équipes (BTP).
Notons que la moyenne d’âge dans cette branche d’activité est élevée, et plusieurs employés sont partis en retraite puisque la majorité de ces personnes sont des anciens employés de la SOFOMECA.
Les Moyens et Procédés de production
Le modelage représente la première phase dans le processus de fabrication de la fonderie. Il requiert un haut niveau de compétence afin d’obtenir les tolérances étroites nécessaires des moules et des boites à noyaux. Cette étape est cruciale dans le procédé de coulée.
En Tunisie, cette fonction est assurée essentiellement par les anciens modeleurs formés auparavant par la SOFOMECA. Les modèles sont fabriqués, souvent, à l’aide d’outils manuels ou de machines universelles.
Néanmoins, les fonderies font recours, parfois, à la sous-traitance appliquant le système de conception et de fabrication assistées par ordinateur sur des machines commandées de façon numérique (CNC), pour la confection des modèles nécessitant plus de précision.
Les modèles et les matériaux de boite à noyau sont habituellement en métal, en résine, en plastique, en bois ou en plâtre. La cire et le polystyrène sont respectivement utilisés dans des procédés de coulée à la cire perdue.
Le procédé de moulage le plus pratiqué dans les fonderies de fonte et d’acier est le moulage en sable à ver en raison de son faible coût de fabrication. Le moulage en sable rigide n’est pas très appliqué à cause du coût d’achat très élevé des résines.
Il est essentiellement utilisé pour les grosses pièces et la production unitaire (moulage à main).
Le moulage en sable se fait soit manuellement à l’aide d’un fouloir vibrant ou sur des machines à moulage horizontal à vibration/ pression ou sur des machines à moulage vertical ayant une cadence de production allant jusqu’à 100 moules / heure.
Les coquilles métalliques pour la fabrication de pièces en alliages d’aluminium, de cuivre ou de zinc sont généralement sous-traitées à l’extérieur de l’entreprise.
Concernant la fabrication des noyaux, les fonderies utilisent deux procédés de fabrication, à savoir : le Silicate de soude et l’Ashland.
Les équipements utilisés dans la section de parachèvement sont : Grenailleuse à tapis ou à charge suspendue, scies et tronçonneuses, tourets à meuler.
Outre les pièces brutes, les fonderies tunisiennes fournissent des pièces usinées grâce aux partenariats avec des usineurs locaux et européens.
Les matières premières nécessaires
La ferraille est la principale matière première employée dans les fonderies des métaux ferreux.
Les fonderies de fonte utilisent également la fonte gueuse, appelée aussi la fonte de première fusion, qui est obtenue directement par le traitement du minerai (l’hématite, la magnétite) pour la fabrication de la fonte sphéroïdale.
Concernant les fonderies des métaux non-ferreux, ils utilisent des alliages des métaux à l’instar l’alliage d’aluminium, alliage de cuivre et l’alliage de zinc. Les entreprises off-shores peuvent même importer la matière première sous forme des lingots avant de la fondre et de la couler dans des moules en cire ou dans des coquilles métalliques.
Les fonderies qui font le moulage en sable à ver utilisent la bentonite et le noir minéral comme des additifs.
D’autres produits sont utilisés aussi dans le procédé de moulage en sable tels les colles pour assembler des parties de moule et de noyaux et les agents de démoulage pulvérisés sur le modèle avant le moulage pour éviter le collage du sable.
La majorité des matières premières employées et notamment le graphite, les ferroalliages, les additifs du sable de moulage et les résines du noyautage sont importées.
Les impacts environnementaux
Pour ce secteur, une grande partie des déchets est collectée soit par les sidérurgies et les fonderies soit par des petites structures telles que les ferrailleurs qui procèdent à leur tri et leur traitement. Toutefois, des quantités importantes restent irrécupérables et sont dispersées dans les décharges municipales et/ou autres zones non-contrôlées. Dans ce cadre, plusieurs projets ont été réalisés par l’État pour la gestion des déchets solides à l’instar de la fermeture et la réhabilitation de la décharge sauvage de Henchir El yahoudia (Grand Tunis) et son aménagement en parc urbain.
La situation Internationale de la Branche
En 2014, la production mondiale de la branche de fonderie a augmenté pour atteindre plus de 105 millions de tonne, enregistrant une croissance de 2.3% par rapport à l’année 2013. La production mondiale en 2014 a progressé de 2.8 millions de tonnes par rapport à l’année précédente. Le taux de croissance de la branche de fonderie a subi une légère baisse par rapport à celui réalisé en 2013 (3.4%).
Il est important de souligner que des fluctuations importantes ont touché les fonderies de petites séries, telle est le cas de la Bosnie – Herzégovine avec une croissance de 41% et totalement l’extrême pour la Serbie avec une baisse de 36%.
En 2014, la Chine, le leader mondial dans la production des pièces moulées, a augmenté son résultat de 1.7 million de tonnes (3.8%) par rapport à 2013. Les Etats Unis, le deuxième producteur mondial, a montré une croissance modeste (1.8%), tandis que l’Inde a boosté sa production de 2.2%.
Pour la même période, l’Ukraine, la Turquie et le Taiwan, ont réalisé des gains robustes 14.3%, 13.4% et 14% respectivement. En revanche, la majorité des producteurs des pièces moulées ont enregistré des améliorations médiocres. Par exemple, le Brésil le septième mondial du secteur, a perdu 10.9% de sa production totale, effaçant le gain réalisé en 2013 ( 7. 4 % ) .
Notons dans ce sens que le nombre de fonderies dans le monde est passé de 13000 unités en 2004 à 47145 unités en 2014, enregistrant ainsi une croissance remarquable de 38% sur la période de 10 ans.
L’innovation dans la fonderie
Plusieurs projets sont menés annuellement par les entreprises et les centres de recherche afin de promouvoir l’innovation dans le secteur et répondre aux exigences des clients et des marchés. Ces projets de recherche sont généralement axés sur:
- les matières premières,
- l’élaboration de nouveaux matériaux ou alliages,
- les technologies de fonderie,
- la prédiction de comportement,
- la valorisation des déchets et le développement durable.
Parmi les dernières tendances dans l’industrie de la fonderie, on cite l’utilisation de la fabrication additive et l’impression 3D.
Les recommandations pour améliorer l’exploitation d’une usine
- Le renforcement de la formation en métallurgie et en procédés de transformation et de mise en forme des métaux
- La création d’un centre de formation et de R&D pour les matériaux métalliques.
- La mise en œuvre d’un programme pour la valorisation des déchets solides issus de la production des fonderies des métaux ferreux, et notamment le laitier et le sable usé.
- La facilitation des procédures douanières en matière d’importation de ferroalliage, de résine de noyautage et de matière de moulage.
- Le développement des métaux non ferreux et légers ciblant de nouveaux marchés à haute valeur ajouté comme l’automobile, les énergies renouvelables, la construction navale, l’électrique et la mécanique
- La prospection et la conquête de nouveaux marchés limitrophes (Algérie et la Mauritanie) et les marchés de l’Afrique subsaharienne.
- La mise en place d’un plan de communication et de marketing ciblant la promotion des exportations des produits de la branche « Fonderie ».
- L’organisation de l’entreprise : rationaliser l’organisation et les procédures de gestion pour clarifier les responsabilités et regrouper les fonctions dans un ordre logique.
- Le développement des programmes de formation efficace pour les cadres et les superviseurs de production.
- La spécialisation de l’entreprise pour des produits phares, cela permettra un accroissement de la production et la réalisation des économies d’échelles.
- La mise en œuvre de la démarche de LEAN MANAGEMENT au sein des fonderies, afin de réduire leurs coûts de revient avec une meilleure qualité dans un délai optimal.
- L’alignement à la demande du marché en s’orientant vers la fonte nodulaire (fonte GS) et la fonte malléable.
- Le développement de nouveaux procédés de fabrication telle que la centrifugation inox utilisée dans différents secteurs tels que l’aéronautique, l’énergie et les transports ferroviaire et routier.
- Le développement des techniques de conception des moules et des systèmes d’attaque et de masselotage en utilisant les logiciels de conception mécaniques et de simulation numérique de remplissage.
- Le recours au procédé smart et innovant axée sur la fabrication additive et l’impression 3D pour confectionner l’outillage, de la fonderie ou du moulage
- L’amélioration des équipements de production de moulage et de fusion
- Le développement des travaux de parachèvement au sein de l’organisation à travers l’acquisition de grenailleuse suspendue ou à rouleaux, de sableuse, de four de traitement thermique, matériels d’usinage (tours, fraiseuses,…), cabine de peinture, des tourets à meuler, … .
- L’acquisition de matériel de contrôle du métal et du sable pour renforcer le contrôle qualité.