La ville de Ghar El Melh, petite ville balnéaire de Bizerte et une destination prisée par les estivants tunisiens pendant les canicules, aspire à devenir la première « ville Ramsar » en Tunisie en 2018.
Il s’agit d’une nouvelle labellisation, que la Tunisie a réussi à faire adopter et accréditer à l’échelle internationale, lors de la conférence des parties contractantes de la convention internationale Ramsar régissant la protection des zones humides d’importance internationale tenue en juin 2016 en Uruguay, selon le Fonds Mondial pour la nature (WWF) dont la représentation pour l’Afrique du nord en a fait son cheval de bataille.
Cependant, la réalisation de cet objectif demeure tributaire de plusieurs conditions, d’autant que la région est confrontée à plusieurs défis et problèmes de développement.
En effet, le petit patelin logé entre le mont Nadhour et la lagune qui porte le même nom Ghar El Melh est doté de paysages magnifiques que viennent défigurer des constructions anarchiques et des bouteilles en plastique qui jonchent le vieux port et remplacent même le liège des filets de pêche utilisés dans la lagune.
La richesse naturelle de la région lui a déjà valu son classement en tant que site humide d’importance internationale Ramsar depuis 2007, sans en empêcher, toutefois l’altération ainsi que celle de l’écosytème. » La convention Ramsar n’oblige les Etats à rien à l’exception de la préservation de la zone humide (pas d’enfouissement) et de sa propreté » , selon un responsable de la direction générale des forêts. Pour le premier vice-président de la commune (Ghar El Melh) Mustapha Jebril, la région souffre de la pollution urbaine et industrielle découlant notamment du déversement des eaux usées dans la nature et de la nuisance sonore provenant des zones industrielles limitrophes, outre la prolifération des constructions anarchiques. Il a également, cité à l’occasion de la célébration de la journée mondiale des zones humides le 2 février, la quasi disparition de la plateforme marine au fond du lac et le déclin de l’activité agricole en dépit d’une production agricole d’une qualité dégustative spécifique ( pommes de terre, potirons et pastèques).
Le responsable a appelé à l’adoption d’une approche de développement durable et à réhabiliter l’écosystème, affirmant que le gouverneur de Bizerte a promis de consacrer 70 millions de dinars à la construction de dalots de manière à permettre le renouvellement de l’eau du lac et partant la régénération de la richesse halieutique.
La ville, qui aspire à ce label de ville Ramsar synonyme d’une qualité de vie et d’un processus de décisions, doit répondre à certaines conditions, notamment en ce qui concerne la garantie de la qualité de l’eau, l’adoption d’un plan d’aménagement des territoires et d’un autre de gestion des catastrophes, a précisé Habib Abid, directeur des forêts .
Il s’agit, également, d’intégrer la planification urbaine dans la gestion des zones humides, l’association de la société civile locale, la préservation des pratiques traditionnelles en matière d’agriculture et de pêche, dont » Gataaya « , (pratique de l’agriculture sur des parcelles dans la mer qui sont couvertes d’eau douce à la montée de la marée), une spécificité unique de Ghar El Melh, a précisé de son côté, Sana Mzoughi chargée de projet au WWF.
A cet égard, le musée des zones humides Dar El Bhira, ouvert à l’occasion de la journée, a pour objectif de préserver ces pratiques culturelles et agricoles, a-t-elle dit.
La préservation de ces spécificités constitue un des atouts sur lesquels comptent miser WWF et d’autres organisations internationales et locales pour faire de Ghar El Melh première ville Ramsar en Tunisie.
Cette labellisation, devrait donner un nouvel élan au développement de l’éco-tourisme dans la région « , booster les efforts des pouvoirs publics en matière de promotion du tourisme tunisien, notamment en termes d’attraction de nouveaux bailleurs de fonds en vue d’un développement durable « ,a noté le directeur de WWF Afrique du Nord Faouzi Maamouri.
A ce titre, la fondation pour la nature MAVA a promis un don de 4 millions de dinars pour la région, a-t-il annoncé, précisant que ce montant sera mis à la disposition de plusieurs organisations travaillant sur la région dont WWF, Global water partnership, l’Association des amis des oiseaux et l’Institut national agronomique de Tunisie (INAT). Toutes les parties concernées doivent s’atteler à déterminer les priorités de la région, a-t-il dit. L’enjeu est de taille, d’autant que la Tunisie a déjà perdu 30% de ses zones humides, selon Abid.