1 Euro = 3 Dinars ! quels coûts pour notre économie ?

La chute du dinar Tunisien est devenue, ces derniers jours, le sujet préoccupant la plupart des Tunisiens. En effet, cette dégringolade n’a pas laissé indifférents les économistes tunisiens qui ont tous exprimé leurs avis sur ce sujet délicat.

Certains d’entre eux ont annoncé que la dévaluation de la monnaie du pays serait dévastatrice pour l’économie tunisienne. D’autres ont souligné que cela pourrait être bénéfique pour le pays et pourrait représenter ainsi une opportunité à saisir pour les entreprises tunisiennes.

Economiquement parlons, une chute du dinar tunisien, devrait amorcer l’inflation de nouveau. L’inflation, maintenue difficilement à 3.4% ces derniers mois, a enregistré auparavant des niveaux dépassant 5% annuellement. L’augmentation du coût des produits importés ainsi que l’élévation du prix de revient des produits locaux vont relancer automatiquement, à moyen et à long terme, une inflation qui pourrait être chaotique pour une économie fragilisée par les crises. La hausse des prix pourrait toucher les biens de consommation individuels, du transport etc. Dans un contexte social pareil, un tel scénario est à éviter à tout prix.

Le deuxième coup dur qui sera porté à l’économie tunisienne après la chute du dinar serait l’aggravation du déficit de la balance commerciale qui affiche déjà un déficit chronique et colossal de 12 milliards de dinars par an. Cette hémorragie est étroitement liée, selon des analyses, à des causes structurelles (et non conjoncturelles) notamment la vulnérabilité de l’économie tunisienne qui propose des produits très peu compétitifs sur le marché international.

D’autant plus, le plus important risque engendré par la baisse du dinar par rapport aux principales devises extérieures serait l’emballement de la dette extérieure du pays. Etant donné que la Tunisie est devenue inévitablement dépendante des aides extérieures, une perte de change devrait gonfler les engagements du pays envers ses créanciers. Une dévaluation de 10% pourrait coûter le contribuable tunisien des centaines de millions de dinars de dettes fictives. De telles sommes auraient pu être conduites vers des projets d’investissement. Sachant que le remboursement de la dette tunisienne atteindra en 2017 plus de 8 milliards de dinars tunisien on peut parler d’une bombe à retardement.

En revanche, sur l’autre rive, plusieurs experts ont mentionné que la Banque Centrale de Tunisie (BCT) a adopté, depuis une certaine période, une nouvelle politique basée sur une détermination farouche à stimuler les exportations du pays en rendant plus compétitif, par une dévaluation maitrisée du dinar, nos produits sur le marché international.  Pour les touristes, le séjour en Tunisie va leur coûter beaucoup moins cher qu’auparavant. Les expatriés vont faire des transferts massifs en devises et les investisseurs étrangers s’intéresseront encore plus à la Tunisie, par le biais de délocalisation.

Par ailleurs, la divergence des avis sur le sort de l’économie n’a pas empêché les avis de converger lorsque les raisons de cette baisse ont été évoquées. La BCT, voyant ses réserves de change baisser, a pris ses précautions et s’est privée du droit d’intervenir sur le marché pour rééquilibrer le dinar. Afin de garder un seuil de réserves de sécurité en devises (en nombre de jours d’importations) et pour pouvoir faire face aux besoins d’importations la BCT a dû lâcher le dinar. Par conséquent, d’un seul coup, le dinar s’est échangé à sa vraie valeur et sa descente aux enfers a commencé.

Cet interventionnisme de la BCT a toujours été critiqué par le Fonds monétaire international (FMI) qui a conditionné sa prochaine aide à la Tunisie par l’adoption d’un nouveau régime de change basé sur le flottement libre de la monnaie locale. Pour cette raison, plusieurs experts ont signalé que le dinar va continuer sa chute libre et que l’euro va équivaloir prochainement à 3 dinars. Selon les recommandations du FMI, la Tunisie devrait œuvrer pour que le dinar tunisien représente parfaitement sa vraie valeur.

SBK